Capture-d’écran-2023-06-13-à-15-04-30

Réforme de l'apprentissage x enseignement supérieur

Grâce à la réforme de l’apprentissage en 2018, un grand nombre de jeunes ont pu accéder à l’enseignement supérieur. Cependant, face à cet ascenseur social, il reste des défis budgétaires à relever pour préserver ses bénéfices. C’est l’idée que développe Philippe Grassaud, à qui Studyrama a laissé la parole :

 

En 2023, le pays n’aura jamais compté autant d’apprentis dans le post comme pré-bac. L’accès aux études supérieures des jeunes qui en sont les plus éloignés n’est pas le moindre des succès de la réforme de 2018. Et un casse-tête budgétaire pour trouver le bon équilibre financier sans en perdre les bénéfices. Pour pérenniser cet ascenseur social réinventé, les acteurs que sont, l’Etat, les entreprises, les écoles et CFA doivent dialoguer pour repenser son fonctionnement et réaliser les bons arbitrages.

 

Philippe Grassaud, président de L’Alliance Eduservices

Investir pour une pédagogie et un encadrement spécifiques des apprentis

L’objectif de réduction des prises en charge ne doit pas se faire au détriment des excellents résultats obtenus par cette politique : la promotion sociale, le désenclavement culturel et professionnel des jeunes en particulier des plus éloignés de l’emploi. L’apprentissage a ouvert la base sociale des jeunes qui accèdent à des études supérieures et développent une réelle ambition de vie. Les candidats à l’apprentissage doivent avoir la maturité nécessaire pour intégrer les règles inhérentes au monde du travail et apprendre à gérer leur frustration face à un monde nouveau.

Les employeurs de leur côté doivent être capables d’adapter leurs exigences et de faire preuve de pédagogie. Le niveau moyen des ruptures des contrats d’apprentissage, 15 à 28 %, démontre la nécessité d’accompagner les jeunes comme les employeurs. C’est pourquoi, plus que la quantité des heures de cours ce sont une pédagogie et un encadrement spécifiques pour l’apprentissage qui doivent concentrer une large part des moyens investis.

 

Un nouveau modèle économique qui exaspère la concurrence

La réforme de l’apprentissage a bouleversé le modèle économique de l’enseignement supérieur. D’une part, en ouvrant la possibilité de suivre des études supérieures gratuites accompagnées d’un CDD et d’une rémunération, et, d’autre part, en conditionnant le financement de l’offre au placement des jeunes en entreprise par l’organisme de formation. La demande a explosé à la fois par l‘attrait du dispositif pour les jeunes et par les avantages consentis aux employeurs. Mais, de fait, se superposent deux dispositifs, celui du Mesri, qui a placé la recherche et les enseignants-chercheurs, le savoir, au cœur de son enseignement et qui nourrit autant les Université que les écoles labellisées ; Celui du Ministère du travail et de France Compétences qui en une trentaine d’années ont dessiné un nouveau paysage dans l’enseignement supérieur avec en son milieu la reconnaissance des compétences et l’objectif de l’insertion par la professionnalisation des enseignements. De fait, la répartition des ressources dans le supérieur est posée alors que l’apprentissage est en passe de devenir le premier vœu des jeunes et de leurs familles.

 

La question du financement

Les CFA dit « nouveaux » de la réforme sont les héritiers d’un savoir-faire acquis grâce au dispositif des contrats de professionnalisation. Leur succès et leurs expériences passées ont logiquement inspiré la réforme pour répondre aux vœux du gouvernement. En une paire d’années, ce dernier a réussi à offrir à 500 000 jeunes des études supérieures en accompagnant une offre privée performante et efficace. L’offre privée a ainsi répondu par ses investissements, sa créativité et sa qualité à la demande massive d’une nouvelle vague de jeunes invisibles jusqu’alors pour l’enseignement supérieur traditionnel. Créant des campus, développant de nouveaux outils pédagogiques, répondant à la crise du Covid de manière exemplaire sans jamais laisser les jeunes livrés à eux-mêmes. Nous ne sommes qu’à l’adolescence de ce nouvel âge de l’enseignement supérieur, beaucoup reste à faire pour concerner ces jeunes, les écouter, améliorer l’offre de formation, chasser les opportunistes, motiver les entreprises à jouer pleinement leur rôle, en abondant les prises en charges, en valorisant ces jeunes qui sont la force de demain. Aider l’université à répondre à la demande par un partenariat équitable avec l’offre privée, partager nos savoir-faire. Poser la question du financement de l’apprentissage revient à poser la question du financement de l’enseignement supérieur. Sans les investissements et l’agilité du privé, rien n’aurait été possible et certainement pas ce niveau de résultat.

La réussite Française de l’apprentissage est exemplaire au niveau européen, grace à un dispositif global qui allie l’Etat, le secteur privé de l’enseignement et les entreprises de manière originale fortement productif socialement. Inutile d’aller chercher la légitimité à l’exterieur aucune certification anglo-saxone ou autre n’est comparable. Ce sont désormais nos voisins qui viennent s’inspirer de notre modèle. L’internationalisation du modèle français, n’est pas un vœu pieux, nous sommes capables de l’exporter, distribuer nos certifications dans tous les pays pour lesquels le chômage des jeunes est un problème endémique. Ce savoir-faire doit être reconnu par tous, sachons être prophète en notre pays.

 

Source : “La réforme de l’apprentissage a bouleversé le modèle économique de l’enseignement supérieur” - Tribune Alliance Eduservices